Au
sujet du traitement de la peur, une personne m’a dit que dans le bouddhisme, on
peut utiliser la respiration pour sortir de son identification à la peur. Ainsi d’après elle, faire l’effort de
respirer avec l’abdomen dans des moments d’angoisse, ou de peur serait une
démarche courante notamment dans le zen. Et il m’a été précisé que nombre de
pratiquants témoignent des bienfaits de cette technique en matière de détente
corporelle et d’apaisement de l’esprit.
Puis,
il m’a été alors été demandé ce que je pensais de cette méthode. Or comme
je trouve cette question
particulièrement intéressante, je souhaite reproduire ici ce que j’en pense.
En
fait, tout dépend de ce que l'on fait. En utilisant une technique de
concentration de l’esprit sur la respiration, je pense qu’il y a apaisement sur
l’instant mais comme il n’y a pas de traitement cognitif ou émotionnel de
la peur, on en reste à une relaxation
sur le moment. Pour moi, c’est une astuce, un truc : on pense à autre chose.
C’est « juste » un détournement de l’attention. Mais il est vrai que ça marche
car on focalise son attention sur autre chose. Cependant comme le problème
n'est pas traité mais détourné, la peur fatalement réapparaîtra. Pour ma part,
ce qui me semble plus pertinent, c’est lorsque la représentation mentale qui
accompagnait la peur n’est plus associée à la peur alors qu’elle demeure
présente à l’esprit. Là, je pense à des
traitements émotionnels comme dans
l’EMDR, par exemple, où l'on est avec l’image qui créer la peur mais en
même temps, on porte son attention sur le mouvement de la main du thérapeute ce
qui baisse l’intensité de la charge émotionnelle qui accompagne l’image. La
peur se dilue car il n’y a plus focalisation mais extension de la conscience
sur d’autres choses et non pas détournement de l’image traumatisante. Autrement
dit, j’ai peur donc je ressens la peur, je vois l’image mais j’investis la
conscience afin d’entendre aussi les commentaires que je fais sur l’image mais
je reste également conscient de mon environnement immédiat. Ce qui aboutit au
fait que je ne suis plus fasciné par l’image et totalement pris par la
sensation d’angoisse, je deviens
observation détachée de l’ensemble du phénomène.
Puisque la question faisait référence au
zen, à mon sens, c’est dans le livre « Vivre zen » de Joko
Beck qu’un des élèves de cette enseignante explique le mieux cela. Et bien qu’il
parle de la colère, je pense que
c’est valable pour toutes les émotions.
Je le cite:
« hier soir, en me rendant quelque part,
j’avais l’esprit bourré de pensées et de sentiments. J’ai cru que je pratiquais
parce que je savais que j’étais en colère, que j’étais tendu, que j’étais
pressé, et je me rendais compte que j’étais de plus en plus furieux et
contrarié. Et puis je me suis demandé tout d’un coup : « mais qu’est-ce que
c’est que « pratiquer » là, maintenant, tout de suite ? » Ça a
été comme si des milliers de flashes éclairait ce qui se passait dans ma tête :
les mêmes éléments étaient bien toujours
là – la colère, la hâte, la tension
physique – mais ils m’apparaissaient sous un jour totalement impersonnel : tout
cela n’avait pas de rapport avec moi. C’était presque comme si je regardais un
cafard sur le sol de la cuisine. »